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La rupture conventionnelle est un mode de rupture de contrat de travail dont le succès n’est aujourd’hui plus à démontrer.
En effet, tous les employeurs et tous les salariés titulaires d’un contrat à durée indéterminée peuvent conclure une rupture conventionnelle. En revanche, ce mode de résiliation du contrat ne s’applique pas au CDD ou au contrat d’apprentissage (Circ. DGT no 2009-04, 17 mars 2009).
La rupture conventionnelle devant être librement consentie par le salarié (article L. 1237-11 du code du travail), sa conclusion ne peut pas intervenir dès lors que le consentement du salarié est vicié.
Le consentement du salarié est vicié lorsque celui-ci a été donné :
(Règles de droit commun s’agissant du consentement des parties à un contrat et énoncées à l’article 1109 du code civil).
Dans le même temps, la Cour de Cassation juge que l’existence d’un différend entre le salarié et l’employeur n’affecte pas par lui-même la validité de la rupture conventionnelle (Cass. soc., 23 mai 2013, no 12-13.865, ; Cass. soc., 26 juin 2013, no 12-15.208,; Cass. soc., 3 juill. 2013, no 12-19.268; Cass. soc., 15 janv. 2014, no 12-23.942)
Dès lors, quelles situations précises provoquent automatiquement la nullité de la rupture conventionnelle ?
En effet, le non respect de certaines obligations mises à la charge de l’employeur, dans le cadre de la procédure de rupture conventionnelle, sont simplement sanctionnées par l’irrégularité de la procédure et non sa nullité, ce qui empêche de fait de demander la requalification de la rupture du contrat.
Exemple 1 : L’employeur omet d’indiquer à son salarié la possibilité qui lui est offerte de se faire assister le jour de l’entretien relatif à la conclusions d’une rupture conventionnelle. Ce défaut d’information du salarié n’a pas pour effet d’entraîner la nullité de la convention de rupture, sauf si le consentement du salarié a été vicié et si ce dernier en rapporte la preuve (Cass. soc., 29 janv. 2014, no 12-27.594).
Exemple 2 : la stipulation d’une indemnité inférieure au minimum légal dans la convention de rupture ne suffit pas à entraîner en elle-même la nullité de la convention demandée par le salarié.
Seule une action en paiement d’un complément d’indemnité devant la justice est alors offerte au salarié.
Exemple 3 : l’erreur de date de rupture du contrat fixée par les parties dans la convention avant la date de l’homologation ne suffit pas à entraîner la nullité de la rupture conventionnelle. Il appartient au juge de rectifier la date en la fixant au lendemain de cette homologation (Cass. soc. 8 juillet 2015 n° 14-10.139).
Portons donc notre attention sur deux hypothèses fréquentes et qui entrainent de fait la nullité de la rupture conventionnelle :
Conformément aux dispositions de l’article L. 1237-14 du Code du travail, l’accord des parties doit être matérialisé par une convention de rupture dont un exemplaire doit être transmis par la partie la plus diligente (souvent l’employeur) à la DIRECCTE pour homologation.
Celle-ci doit être conforme au modèle Cerfa établi par le ministère du Travail qui constitue un document indivisible incluant la convention de rupture proprement dite et la demande d’homologation (Arr. 8 févr. 2012, JO 17 févr. abrogeant l’arrêté du 18 juillet 2008)
Ce modèle est disponible sur le site http://www.travail-emploi-santé.gouv.fr
Le formulaire doit être signé par l’employeur et le salarié.
Bien que la loi ne le prévoit pas, la Cour de cassation impose d’établir, outre l’exemplaire destiné à la DIRECCTE, un deuxième exemplaire devant être remis au salarié afin que :
À défaut, le salarié peut obtenir l’annulation de la rupture conventionnelle (Cass. soc., 6 févr. 2013, no 11-27.000).
En l’absence de mention dans la convention de rupture du nombre d’originaux établis, la preuve de cette remise n’est pas rapportée.
L’employeur doit donc se ménager la preuve de la remise d’un exemplaire au salarié en faisant notamment apparaître la mention du nombre d’originaux établis pour éviter toute réclamation du salarié tendant à invoquer le vice du consentement à l’appui d’une demande de nullité de la rupture conventionnelle.
Employeurs, veillez donc à mentionner le nombre d’exemplaires établis et à remettre un exemplaire original du Cerfa au salarié contre décharge.
Une fois la rupture conventionnelle signée, chacune des deux parties dispose d’un délai de 15 jours calendaires pour se rétracter (article L. 1237-13 du code du travail).
Ce délai, qui inclut tous les jours de la semaine, commence à courir à compter du lendemain de la date de la signature de la convention de rupture (Circ. DGT no 2009-04, 17 mars 2009, § 4.1) et se termine le quinzième jour à minuit.
Une fois le délai expiré, le salarié ne peut plus se rétracter, mais il peut néanmoins contester la rupture conventionnelle par voie judiciaire.
Ce délai de rétractation de 15 jours doit être impérativement respecté. À défaut, le salarié pourrait demander l’annulation de la convention pour vice du consentement ou privation de la possibilité d’exercer son droit à rétractation.
C’est notamment le cas lorsque l’employer est tenté d’antidater la signature du Cerfa par les parties et ce pour s’éviter toute rétractation du salarié. Le Cerfa de rupture est dans ce cas adressé immédiatement à la DIRECCTE après avoir été signé.
Cette fraude à la loi mise en place par l’employeur est automatiquement requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse par les juridictions prud’homales dans la mesure où le salarié en apporte la preuve…
Et c’est souvent là le problème..
Salariés, veillez donc à ce que la date de signature du Cerfa corresponde bien à la date du jour de la signature effective sinon refusez clairement de signer la rupture conventionnelle.
Si vous avez déjà signé le Cerfa, faîtes faire un constat d’huissier, envoyer un courrier recommandé ou électronique à votre employeur indiquant que la date est erronée, prenez une photo de votre exemplaire original de Cerfa avec le journal du jour pour vous ménager des preuves en justice.
La signature de la convention de rupture doit en principe être précédée d’un ou plusieurs entretiens entre les parties (article L. 1237-12 du code du travail).
En pratique, plusieurs entretiens sont nécessaires pour s’accorder sur le principe même de la rupture, mais également sur les modalités de celle-ci et les différentes difficultés qu’elle peut soulever.
Notez que la loi n’instaurant aucun délai entre l’entretien et la signature de la convention de rupture, celle-ci peut être intervenir pendant l’entretien.
Dans un arrêt du 1er décembre 2016 n°15-21.609, sous le visa des articles L. 1237-12 du code du travail et 1315, devenu 1353 du code civil, La Cour de cassation est venue préciser que « si le défaut du ou des entretiens prévus par le premier de ces textes, relatif à la conclusion d’une convention de rupture, entraîne la nullité de la convention, c’est à celui qui invoque cette cause de nullité d’en établir l’existence ».
En effet, selon l’article 1315 du code civil précise que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ».
Deux enseignements sont à tirer de cet arrêt récent publié au Bulletin :
Sur ce deuxième point, précisons que la signature, par le salarié et l’employeur d’une convention de rupture sur laquelle est mentionnée la tenue d’au moins un entretien laisse ainsi présumer son existence, et c’est donc au salarié qui soutient qu’il n’a, en définitive, pas eu lieu, de renverser cette présomption.
Salariés, veillez donc là aussi à ne pas signer de Cerfa de rupture conventionnelle si aucun entretien ne vous a permis de négocier les conditions de la rupture de votre contrat de travail.
Employeurs, si la preuve sur la tenue d’un entretien incombe au salarié, vous pouvez aussi par précaution, convoquer votre salarié, par courrier recommandé ou courrier remis en main propre contre décharge, pour vous ménager une preuve.
Cependant, veillez à ce que la formulation de votre courrier de convocation ne traduise pas votre unique volonté à la conclusion d’une rupture conventionnelle.
Sachez pour finir, que les parties et notamment les salariés, disposent d’un délai de douze mois à compter de la date d’homologation de la convention pour former un recours juridictionnel devant le Conseil des Prud’hommes et contester la rupture de leur contrat de travail (article L. 1237-14, al. 4 du code du travail).
Lorsque la rupture conventionnelle est déclarée nulle elle n’ouvre pas droit à réintégration du salarié.
Elle est cependant traitée comme une prise d’acte de rupture, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 30 janv. 2013, no 11-22.332, Bull. civ. V, no 24) ou d’un licenciement nul selon les hypothèses.
Dès lors, salariés, vous pouvez prétendre, au minimum, à des dommages et intérêts en requalification de votre rupture conventionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou licenciement nul, à une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement si elle ne vous a pas été versée et à une indemnité compensatrice de préavis .
Attention : L’indemnité conventionnelle doit être négociée entre le salarié et l’employeur en fonction des droits de chacun et des risques d’une contestation ultérieure par le salarié devant le Conseil des Prud’hommes de la rupture de son contrat de travail.
C’est pourquoi, dans le cas d’un différend au moment de la rupture conventionnelle, seule la négociation entre avocats permet la préservation des intérêts notamment financiers des parties.
Dans tous les cas, chaque situation est unique et l’assistance d’un avocat expert en droit du travail est fortement conseillée que vous soyez employeur ou salarié afin de faire valoir vos droits..
Maître Jérémie AHARFI
Avocat au Barreau de Toulouse – Expert en Droit du travail
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