La nouvelle présomption de démission : à l’insu de son plein gré?
20 juillet 2023
- La nouvelle présomption de démission a été instaurée par le Décret du 17 avril 2023, n°2023-275 (Publié au JO) néanmoins il existe un recours en cours devant le Conseil d’Etat. Par ailleurs, les nouvelles Questions-Réponses pratiques (désormais d’usage) sur le sujet du décret ont été retirées de la plateforme en ligne du Ministère du Travail.
- Les DRH des entreprises restent donc plutôt frileuses à s’accaparer effectivement du dispositif de sorte que le salarié ne doit pas hésiter à se faire conseiller en cas d’application directe du décret car le cadre juridique reste très approximatif et dangereux du point de vue du risque prud’homal pour l’employeur. En effet, la démission doit depuis toujours résulter d’une manifestation claire, non équivoque, par le biais d’un écrit du salarié, protection nécessaire face aux larges conséquences de ce mode de rupture du contrat (aucune indemnité de rupture pour tout salarié quel que soit son ancienneté, exclusion sur le principe du droit aux ARE du pôle emploi)
- L’abandon de poste peut toujours constituer un motif de licenciement pour faute grave malgré cette nouvelle présomption. En effet, l’employeur qui sollicite de son salarié un retour à son poste ou la justification de son absence (en l’absence de la transmission d’un arrêt de travail) est en droit d’une part, de suspendre la rémunération et d’autre part, de constater une faute continue et d’une certaine gravité pouvant justifier la rupture immédiate du contrat de travail ;
- Le décret précité vient désormais permettre à l’employeur de considérer son salarié comme démissionnaire sans volonté exprimée par ce dernier lorsque celui-ci est absent sans le justifier par ailleurs ;
- Pour donner ses effets à la démission, l’employeur doit mettre en demeure par LRAR son salarié de justifier son absence ou de reprendre son poste et lui indiquer que faute de retour de sa part dans un délai de 15 jours calendaires à compter de la réception du courrier, sa démission sera caractérisée et son silence vaudra également refus d’exécuter le préavis subséquent à la caractérisation de la démission ;
- Exception à ce dispositif : un motif légitime transmis par retour du salarié dans le délai précité de 15 jours ;
- Le motif légitime peut être :
-un danger grave et imminent de reprendre son poste (peut faire écho à un droit de retrait et à une violation de l’obligation de sécurité de l’employeur),
-une raison médicale (qui a priori l’a empêché de transmettre un arrêt jusqu’ici),
-l’exercice du droit de grève,
-le refus du salarié d’exécuter une instruction contraire à une réglementation ou la modification du contrat de travail à l’initiative de l’employeur (soit par ex la modification d’un élément essentiel du contrat comme la rémunération, le lieu de travail, la qualification professionnelle ..)
- En l’état, en l’absence de précisions dans le décret, même après un long arrêt de travail en mois voir en années non justifié du salarié, l’employeur, dans une volonté de « toiletter » son registre du personnel et n’ayant pas licencié, pourrait reprendre contact avec le salarié pour lui demander de justifier son absence, puis le considérer comme démissionnaire et enfin lui demander d’exécuter son préavis sur poste ;
- Conseil : le salarié n’a aucun intérêt et n’avait aucun intérêt bien avant même ce décret, de laisser son employeur sans nouvelles en ne fournissant pas d’arrêt de travail puisque faisant toujours partie des effectifs, ne pouvant donc se mettre au service d’un autre employeur, avec le risque d’arrêt d’indemnisation à terme par la CPAM via les IJ de base et par conséquent l’arrêt du bénéfice des indemnités complémentaires liés à la prévoyance ou au maintien légal de salaire, tout en n’ayant nullement par ailleurs, l’assurance d’être licencié.
A déconseiller donc..
Maitre Jérémie AHARFI | Avocat droit du travail toulouse
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