Q/R : le contrôle du salarié pendant l’arrêt maladie et la création d’une activité professionnelle pendant le « temps libre »

20 décembre 2023
Interview pour le site Mercipourl’info.fr (ex Dossier familial) – Editions de novembre et décembre 2023.
Au sommaire :
-> Dans quel cadre puis-je être contrôlé pendant mon arrêt de travail?
->Puis-je avoir une activité en complément de revenus pendant mes week-end et congés?

 

Mon employeur peut-il vérifier ou faire vérifier ma présence à mon domicile alors que je suis en arrêt maladie ?

Me Jérémie AHARFI, Avocat au Barreau de Toulouse – Expert en droit du travail – Défense des salariés

Le contrôle d’un arrêt de travail pour maladie peut être fait par un médecin conseil de la Caisse primaire d’assurance maladie mais une contre-visite peut aussi être réalisée à l’initiative d’un employeur. Elle est prévue par le Code du travail seulement dans les cas où il maintient tout ou partie du salaire de l’employé en arrêt, notamment en lui versant des indemnités complémentaires à celle de l’assurance maladie. Il s’agit d’une pratique de plus en plus fréquente, utilisée en cas de suspicion de fraude de l’employeur et/ou pour le cas d’arrêts longue maladie.

L’employeur n’a pas à motiver cette contre-visite mais il doit s’adresser pour la réaliser à un médecin indépendant ou à un organisme spécialisé dans les contrôles médicaux. Vous ne pouvez pas vous soustraire à ce contrôle, qui n’est pas obligatoirement annoncé. En cas de sorties libres prévues par l’arrêt, le contrôle peut se faire entre 7h et 20h, le médecin contrôleur laissera un avis de passage en cas d’absence si aucun rdv n’avait été pris, il précisera une date de visite ultérieure.

La contre-visite patronale permet de vérifier l’incapacité de travail du salarié (question sur l’état de santé, vérification des des ordonnances, examen médical etc.). Elle porte sur le bien-fondé de l’arrêt – au moment de la visite – et sur sa durée, également sur le contrôle des heures de sortie si elles ont été prévues par le médecin prescripteur. Vous ne pouvez pas vous faire assister par votre médecin traitant lors de ce contrôle.

En cas de refus du contrôle ou d’absence hors des heures de sortie autorisées – sauf motif légitime comme un rendez-vous médical, ou encore s’il constate l’absence de justification du maintien de l’arrêt, le médecin contrôleur en informe la CPAM qui pourra décider éventuellement de suspendre le versement des indemnités journalières. L’employeur lui peut mettre fin dès le lendemain au versement des indemnités complémentaires et ce jusqu’à la fin de l’arrêt en cours (sans effet rétroactif). Néanmoins, quels que soient ses résultats, cette contre-visite ne peut conduire à une sanction professionnelle ou à un licenciement ni même anticiper la date de fin de l’arrêt en cours.

Le salarié est en droit de demander un nouvel examen médical au service de contrôle de la CPAM dans un délai de 10 jours à compter de la suspension éventuelle de ses indemnités journalières.

A savoir :

Droits du salarié : le salarié peut demander avec l’accord de l’employeur l’arbitrage d’un troisième médecin ou obtenir par voie judiciaire (procédure d’urgence devant le Conseil de prud’hommes) la désignation d’un médecin expert. Par ailleurs, des contrôles répétés et abusifs de l’employeur pourraient laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral en cas de recours justifié du salarié en justice.

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Je suis salarié. Puis-je créer en complément une micro-entreprise qui ne m’occupera que les week-ends et les vacances ?

La question est souvent posée par des salariés qui souhaitent entamer une transition professionnelle. Le cumul d’une activité salariée avec la création d’une micro-entreprise – ou d’une entreprise sous un autre statut comme une SARL ou une SASU – est possible. Mais plusieurs conditions doivent être réunies dans ce cas.

Vérifiez que votre contrat de travail ne comporte pas de clause d’exclusivité, par laquelle le salarié s’engage durant toute la durée de son exécution à ne travailler que pour son employeur et à l’exclusion de toute autre activité. Pour être valable, elle doit concerner un salarié à temps plein, être indispensable à la protection des intérêts de l’entreprise, proportionnée au but recherché et justifiée par la nature de vos fonctions.

Notez que dans tous les cas, et même en l’absence de clause écrite, votre activité d’entrepreneur ne doit pas entrer en concurrence avec celle de l’entreprise qui vous salarie. Dans ce cas, vous risquez de contrevenir à l’obligation de loyauté envers votre employeur, ce qui peut être caractérisé comme une faute, voire conduire à un licenciement pour faute grave.

Dans le cas particulier d’une création ou d’une reprise d’entreprise ou d’activité libérale, la clause d’exclusivité est temporairement inopposable par l’employeur pendant le délai d’1 an envers les salariés en CDI ou en CDD soit à compter de l’inscription au registre du commerce et des sociétés soit à compter de la prise du congé sabbatique ou pour création d’entreprise. Il est néanmoins toujours souhaitable de pouvoir informer son employeur avant que celui-ci ne découvre votre nouvelle entreprise sur internet.

Il est bien sûr interdit d’exercer sa nouvelle activité durant ses heures de travail salarié et d’utiliser le matériel de l’entreprise à ses fins personnelles. D’autre part, vous devrez respecter la durée maximum de travail et minimum de repos prévue par le code du travail en cumulant vos différentes activités. Votre employeur pourra chercher à s’en assurer en vous demandant, par exemple, une attestation sur l’honneur de ne pas dépasser la durée quotidienne de 10 heures de travail et de 48 heures par semaine, avec un jour de repos hebdomadaire.

Bon à savoir :

Le congé de création d’entreprise permet de se lancer en restant dans les effectifs de votre entreprise. Le contrat de travail est alors suspendu sur le principe et par conséquent le versement de la rémunération également. Mais les dispositions propres à certaines conventions collectives ou accords collectifs peuvent prévoir des dispositions plus favorables. L’employeur ne peut le refuser que sous certaines conditions précises.

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